L’origine de la découverte de la Réunion reste encore un mystère mais il semblerait que les Arabes et les Austronésiens (Indonésie et Malaisie d’aujourd’hui) ont découvert l’île en premier avant le XVème siècle, car ils connaissaient bien l’Océan Indien, ils faisaient du commerce le long de la côte est de l’Afrique. Quand ils découvrirent l’île ils la nommèrent « Dina Morgabin » qui signifie l’Ile de l’ouest, elle apparait sur une carte portugaise en 1502 sur le planisphère de Cantino.
En 1498, Vasco de Gama (navigateur portugais) arrive dans l’océan Indien, remonte le Canal du Mozambique, explore Madagascar, l’Ile du Mozambique et va jusqu’à Calicut en Inde, c’est à partir de là que commence véritablement la colonisation européenne de l’océan Indien. Après les Portugais, ce sont les Hollandais mais aussi les Anglais et les Français qui s’engagent dans l’expédition coloniale.
Comment Diogo Dias a-t-il découvert l’île ?
Le 9 Mars 1500, une expédition de 13 vaisseaux quittait Lisbonne à destination du Sud de l’Afrique et des Indes. En voulant s’éloigner très à l’ouest de la côte africaine afin de mieux profiter des alizés, la flotte découvrit le Brésil le 22 Avril 1500, puis le 24 mai, l’expédition se trouvait au large du Cap de Bonne Espérance lorsqu’une violente tempête s’abattit sur elle. Le navire fut séparé de la flotte et fut repoussé au Sud-est de Madagascar, sur une mer où aucun Européen n’était jamais allé. Perdu Dias décide de rejoindre l’escale de Mozambique en se dirigeant vers le Nord-Ouest. C’est en suivant ce parcours qu’il a pu passer à vue des îles Mascareignes, puisqu’il découvrit Madagascar le 10 août 1500.
Par la suite, le commerce portugais vers les Indes s’accrut suite à l’expédition de Cabral ; entre 1500 et 1528, 299 vaisseaux portugais franchirent le Cap de Bonne Espérance. L’image des îles Mascareignes se précisa sur les cartes.
L’île a été abordée le 9 février 1507 le jour de la Sainte-Apolline, et qu’elle a été baptisée Santa Apolonia. Lorsque les navigateurs portugais se rendaient aux Indes, l’île leur servait d’escale sur la route des épices.
Pedro de Mascarenhas 1597 : l’île figure sous le nom de Santo Appolonia
En 1520, le navigateur Pedro Mascarenhas nomma Islas Mascarenhas (iles des Mascareignes) l’archipel réunissant les îles Maurice, Rodrigues et Santa Apolonia. De retour aux Indes en 1528, le navigateur Mascarenhas fit escale à Santa Apolonia pour décharger une cargaison de porcs, de chèvres, de bœufs, de singes, qu’il laissa en liberté. Ainsi, lorsque les circonstances s’y prêtaient, les navigateurs portugais accostaient et déposaient leur trop plein, que ce soit des plantes, des fleurs ou des animaux.
En somme, l’île Santa Apolonia semblait susciter tellement peu d’intérêt que Portugais, Hollandais et Anglais y débarquèrent sans même en prendre possession. D’après les récits de l’époque, il était très difficile d’accoster à l’île en raison des accidents de terrain sur le littoral, c’est ce qui expliquerait le manque d’intérêt envers l’île de la part des navigateurs du XVIème siècle.
Le littoral
Mais à peine découverte, l’île retombe dans un oubli presque total pendant plus d’un siècle. Elle n’offre rien aux navigateurs, pas d’or, pas de populations à évangéliser, la Réunion n’a pas de port, à la mauvaise saison, un coup de vent peu briser un navire sur la côte rocheuse.
Description de l’île :
En 1611, l’Amiral hollandais, Pierre Guillaume Verhuff aborde l’île. Il estime que la distance de Santa Apolonia jusqu’à Maurice est de 80 miles. Il donne les premiers renseignements sur la faune et la flore. Il décrit une île paradisiaque vierge avec des cours d’eau, des animaux tels que des tortues, des tourterelles, des perroquets, solitaires, anguilles, canards, oies, tous extrêmement facile à tuer.
Le 6 aout 1612, une flotte de 13 vaisseaux aborde l’île, c’est la première mention d’une escale. Voici la description faite par le Capitaine Block :
« Après le 3 août, alors que nous pensions nous diriger vers l’île Maurice, nous aperçûmes l’île de Mascarenhas, qui est située à la latitude de 21 degrés au Sud de l’Équateur et approximativement à 20 lieues à l’Ouest de Maurice. À cause des vents d’Est Sud-Est et d’Est nous ne pouvions nous diriger que vers l’Ouest, aussi nous dûmes chercher un ancrage à cette île de Mascareigne. Nous en trouvâmes un le 6 de ce mois sur la côte Nord-Ouest dans une baie très large, par 25, 30, et 35 brasses, fond de bon sable noir, où nous débarquâmes. Nous trouvâmes entre les hautes montagnes et le bord de mer une étendue d’eau douce délicieuse et propre, pleine de poissons extraordinairement beaux et variés, et sur les rives de cette eau la terre était remplie d’une multitude de toutes sortes de volailles, surtout des oies, des canards, des hérons, des tourterelles et des perroquets, et plein d’autres oiseaux petits et grands dont nous ne connaissions pas les noms. Ainsi nous avons obtenu ici de très bons rafraîchissements; tout nous tombait sous la main sans effort, et personne n’a éprouvé le besoin d’aller attraper les boucs ou les chèvres que nous avions vus plusieurs fois dans les montagnes en troupeaux plus ou moins importants. L’eau et le bois pour le feu sont ici en abondance et aisés à obtenir, et comme les vaisseaux et flottes de vos excellences, au lieu d’aller à Maurice, trouveront de meilleurs approvisionnements dans cette île, j’ai pensé utile de vous en envoyer cette brève description. »
Le 26 Mars 1613 Le pirate anglais, Samuel Castleton, de passage à bord de son navire, La Perle, donne à l’île le nom d’England’s Forest et aussi Pearl Island. Il jette l’encre à l’Est (Sainte Suzanne). Il relate que l’île est boisée et abrite de grandes tortues terrestres, des poissons dont une volaille de la taille d’un dindon aux ailes courtes et aux plumes blanches. Il s’agit du solitaire, oiseau de grande taille qui disparaitra très rapidement avec l’arrivée des premiers hommes.
Voici son témoignage :
Le 27, latitude 21 degrés, nous vîmes une île Ouest Sud-Ouest, et Sud-Ouest et par l'Ouest à quelque 5 lieues de nous, une très haute terre. A 6 heures du soir, nous jetâmes l'ancre sur le côté Est, à 10 brasses, sable fin et noir, et à un mile du rivage. De 40 à 4 brasses près du rivage, il y a du sable fin noir. Ici nous envoyâmes notre chaloupe sur le rivage, et y trouvâmes un nombre infini de grandes tortues de terre, aussi grosses qu’un homme peut porter, et qui avaient une très bonne viande. La pointe Nord-Est de cette île est très haute et abrupte ; et un peu plus au Sud Est de cette pointe se trouvent des terres basses, où il y a un joli cours d’eau comme une rivière [...] L'île est comme une forêt, alors je l'appelais England's Forest ; mais d'autres l'appelèrent Pearl Island, du nom de notre bateau. Il y a une grande quantité d’oiseaux terrestres petits et gros, plein de tourterelles, de grands perroquets, et bien d’autres. Et une grosse espèce de volaille de la grosseur d'un dindon, très grasse, et aux ailes si courtes qu'elle ne peut voler ; elle est blanche et elle n'est pas sauvage, comme du reste tous les oiseaux de cette île, aucun d'eux n'ayant jusqu'ici été tracassé ni effrayé par des coups de fusils. Nos hommes les abattaient avec des bâtons et des pierres. Dix hommes en tuaient assez pour nourrir quarante personnes par jour. En parcourant l’intérieur nos gens découvrirent une autre rivière et un étang couvert de canards et d’oies sauvages. En plus ils trouvèrent une quantité infinie de grandes anguilles, aussi bonnes, je pense, que n'importe quelles autres dans le monde. »
1619 : Le Hollandais Wilhem Isbrantz Bonte Koe de Hoorn, maitre d’équipage aurait passé 3 mois sur la côte ouest avec son équipage affaibli par le scorbut, il confirme la grande variété, de poissons, de tortues de mer, l’île peut donc devenir un lieu d’escale pour se ravitailler en gibier et en eau fraîche.
Deux Hollandais assis sur une tortue aux premières heures de l’histoire humaine de la Réunion
Wilhem Isbrantz Bonte Koe de Hoorn fit une première description du dodo qu’il appelle le « Solitaire de Bourbon ».
Pour la petite histoire : Selon la légende, les marins s’amusèrent de l’absence de crainte de cet oiseau gentil et maladroit. Ils prirent cette familiarité pour de l’innocence docile, d’où viendrait l’origine de l’expression enfantine "fait dodo", dans le sens de "sois sage"...L’étymologie la plus couramment admise est que le mot viendrait du portugais "doido" qui signifie nigaud, simplet, idiot ou stupide. Mais d’autres sources avancent le mot hollandais "dodoor" qui signifie paresseux.
1629 : Thomas Herbert parle de la luxuriante végétation, la présence de tortues, l’abondance d’eaux douce, de poissons de rivières. « L’île "est si haute que sa tête est souvent enveloppée de nuages. Elle est partout verte et agréable, partout agréablement revêtue d'une belle livrée particulièrement de plusieurs sortes d'arbres dont la hauteur est admirable et le branchage plus épais qu'en aucun autre lieu du monde".
1638 : les français arrivent à leur tour dans l’océan indien, ils arrivent à bord du Saint Alexis, sur lequel se trouve l’aventurier François Cauche. C’est le premier contact de l’île avec les marins français.
1642 : Deuxième prise officielle au nom du roi de France par Jacques de Pronis. Il est gouverneur de France à Madagascar, il veut transformer l'escale de la Réunion sur la route des Indes en un établissement mais il doit y renoncer par manque de colons. Il est agent de la Compagnie de la société de l'Orient, créée par lettre patentes du roi Louis XIII. L'Ile est toujours inhabitée. Arrivé sur le navire le " Saint-Louis", Jacques de Pronis est chargé au départ d'installer et d'organiser un comptoir français à Madagascar. Il créé Fort-Dauphin dans le sud-est de Madagascar en l'honneur du futur roi Louis XIV. Il n'arrive déjà pas à s'imposer à Fort-Dauphin, le comptoir malgache ou la présence française est contestée à la suite d'une rébellion, le gouverneur exile 12 mutins sur l'île Mascarin.
1646 : Débarquement de 12 mutins de Madagascar
Ils sont abandonnés sur la côte est, de là ils feront le tour complet de l’île pendant les deux années suivantes. Par ordre de Flacourt, les 12 mutins sont ramenés au Fort-Dauphin en septembre 1649, en parfaite santé ce qui a semblé surprenant après presque trois années d’isolement à Bourbon.
Le 10 septembre 1654 sur le navire l’Ours, 6 nègres originaires de Madagascar les suivirent. Après 12 jours de navigation ils arrivèrent à la côte ouest de Bourbon et s’établirent dans une anse située à l’ouest nord-ouest, près d’un étang (la ville de Saint Paul). Antoine Thoreau représente l’île comme un paradis terrestre. « Cependant dit-il de la pointe est à la pointe sud est un pays de 20 lieux de long, qui est tout brûlé du feu du ciel, sinon d’aucunes tâches où le feu a passé tout autour. Dans ce pays, qui en apparence a été plus beau que celui qui a été décrit ci-devant, le feu a séché toute eau et rivière, par où elle passe tous les jours jusqu’aux pierres, si bien qu’on ne peut juger autre chose, sinon charbon de terre, que si Dieu n’y met la main, il séchera un pays si abondant en toute sortes de bestiaux, gibiers, poissons, qu’il ne s’en peut pas trouver un pareil pour la vie et pour la santé. »
Antoine Thoreau dit Couillard ancien officier de Flacourt est accusé de vols et trahisons graves. L’île est devenue un lieu d’exil, une prison idéale pour ce qui s’opposent aux administrateurs de la Compagnie à Madagascar.
Ces hommes vivaient heureux sur ce petit bout de terre sauf pendant la saison des ouragans et de cyclones. Les vents étaient très forts, les arbres étaient déracinés, les maisons renversées, les vaisseaux jetés à la côte, le cyclone détruisait tous les ans leurs plantations de tabac.
Cela faisait deux ans et 2 mois qu’ils vivaient sur l’île, quand un navigateur nommé Gosselin (commandant du navire Thomas Guillaume), passa à Bourbon le 28 mai 1658 et leur fit croire que les naturels de Madagascar avaient massacré tous les français à Fort Dauphin, ils décidèrent de le suivre. Trompés ils s’embarquèrent dans son navire pour l’Inde, emportant avec eux le tabac, l’aloès et benjoin qu’ils avaient recueillis dans l’île. Ils arrivèrent à Madraspatam où ils furent obligés de servir comme soldats dans le fort. L’île resta de nouveau sans habitants.
Louis XIV invita la nation à prendre part à l’association de la nouvelle Compagnie des Indes orientales qui se forma en 1664 sous la direction de Colbert. Les fonds s’élevaient à 15 millions. Tout Français quelque soit sa condition pouvait entrer dans ce commerce. Colbert avait choisi Madagascar pour être le siège des opérations.
1663 : Première colonisation de l’île, Louis Payen et Pierre Pau, accompagnés de 10 malgaches (7 hommes et 3 femmes) arrivent à bord du Saint Charles. Ils s’installent à Saint Paul et y resteront 2 ans. La première colonisation entre les Blancs et les Malgaches n’est pas aisée. Ces derniers finissent par fuir dans les montagnes et devenir les premiers marrons de l’île.
Les hauteurs de Saint Gilles et du Bernica commencèrent à se couvrir de plantations sous les ordres de Renaud avec ses 20 ouvriers.
1665 : Une petite agriculture vivrière se met en place dans la région de l'Etang Saint-Paul. L'Ile produit du blé, des légumes, du riz, ainsi qu'un peu de cannes à sucre qui permet déjà de faire un alcool fermenté ( le flangourin : vin de canne ). Les Malgaches sont employés comme "serviteurs" mais sont en réalité des esclaves sans toutefois que ce système soit reconnue par la Compagnie des Indes. Les femmes malgaches deviennent les épouses des Blancs.
1667 : la flotte Montdevergue, devant coloniser Madagascar, aborde l’île et y débarque des malades et aussi un curé, le père Lanonimo de Laros, il est le seul officier de Bourbon. Arrivent aussi quelques femmes blanches dont Antoinette Arnaud et Jeanne de Lacroix. Peu de femmes européennes arrvient finalement à Bourbon.
1668 : La canne à sucre a été introduite dans l’ile. La population l’utilise pour fabriquer du vin de canne fermenté pour sa consommation. Elle vend cet alcool à la Compagnie mais aussi, clandestinement aux pirates qui fréquentent les côtes de l’île.
1671 : De la Haye arriva sur l’île le 1er mai 1671, il fit reconnaitre son autorité dans l’habitation de Saint Denis qui avait été formé en 1665. Il publia les patentes du roi qui lui donnait un pouvoir absolu sur le gouvernement et le clergé de cette île et pris le titre d’Amiral, de gouverneur et de vice roi des Indes. Il réforma beaucoup d’abus. Notamment, l’oisiveté, cultures négligées, chasses immodérées détruisaient le gibier et les bestiaux. Les oiseaux su nombreux autrefois, avaient presque tout disparu, quelques insulaires se sont retirés dans les bois où ils vivaient dans une entière indépendance. De la Haye établit une police rigoureuse, mais nécessaire.
Etienne Régnault reçoit en mai le titre de gouverneur de l'Ile, mais le 9 mai, il est remplacé par Jacques de La Hure, dit Sieur de La Hure, ancien capitaine d'infanterie. La petite société bourbonnaise se met en place.
Déjà 4 habitations s’étaient formées : à Saint Paul, saint Denis, Sainte Marie, Sainte Suzanne. Les mœurs douces et hospitalières des habitants y avaient attirés de nouveaux colons. Les populations augmentèrent, les plantations s’étendirent, on y planta du blé venant de l’Inde, du riz, des cannes à sucre transportés de Madagascar. Le coton était d’excellente qualité. Les récoltes étaient obligatoirement portées dans les magasins de la Compagnie, où elles étaient payées selon un tarif. La pêche et la chasse avait fait la principale occupation du plus grand nombre. Ils avaient sous la main des chèvres, des bœufs, moutons, porcs, oiseaux de toutes espèces.
1er Décembre 1674 : un règlement rendu par De la Haye à son retour de l’Inde, leur interdit la chasse, et nomma des chasseurs chargés de fournir aux magasins de la Compagnie des viandes et gibiers nécessaires pour nourrir la population ainsi que les étrangers. Il fut défendu de tuer des tortues de terre sans une permission du gouverneur, de détruire les mouches à miel.
Tortue de Bourbon
Cylindraspis borbonica est une espèce endémique de La Réunion. Pendant des décénnies et notamment vers la fin du 18ème siècle, elle a été prélevée à bord des navires où elle constituait une réserve de viande fraîche. Elle fut également chassée par les premiers colons pour lesquels elle constituait une proie facile.En dépit de son abondance considérable (effectif estimée au million d'individus), les derniers spécimens s'éteignirent vers 1770, à l'exception d'une petite population isolée à Cilaos. Celle-ci survécut jusqu'aux environs de 1840. Malgré cette exubérance et une protection tardive par décret (sans doute peu respectée), aucune tortue n'a été préservée.
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1690 : l’esclavage apparait officiellement puisque les serviteurs sont qualifiés officiellement d’esclaves. Vauboulon gouverneur de l’île, accorde des concessions et tous les colons se voient reconnaitre la propriété des terres qu’ils exploitent. Le marronnage inquiète les premiers habitants de l’île.
1700 : 750 habitants sur l’île dont 320 Noirs. Un esclave de sexe masculin est vendu à 320 livre, une femme à 200, un négrillon à 150. La Compagnie des Indes se désintéresse de l'Ile. La petite colonie est abandonnée à elle-même, recevant rarement un navire de la Compagnie.
Bonjour
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